Quelques centaines de personnes se sont retrouvées sur la place des Fêtes dans le nord de Paris avant de prendre la direction la Place de la République, dimanche 9 octobre. « Femme, vie, liberté », les trois mots scandés par les manifestants en Iran depuis la mort de Mahsa Amini, ont été repris d’une seule voix par les manifestants. Ceux qui se sont rassemblés et qui manifestent sans relâche depuis la mort de Masha Amini, tuée à l’issue de son arrestation par la police des mœurs, ne veulent plus de cette dictature théocratique.
Il se tient un peu à l’écart de la manifestation et regarde au loin. Rahim a fui son pays depuis longtemps, pour cet ancien réfugié politique, ce qui se passe en Iran est incroyable : « C’est une révolution sans précédent, parce que c’est une révolution féministe, en fait. Ça veut dire que les jeunes filles sont devant, jamais on a connu un tel mouvement de leur part. Dans le monde, je ne connais pas une telle situation. En Iran, vraiment, c’est une situation exceptionnelle. »
Son chemisier blanc en coton tranche avec le noir de ses yeux magnifiques. Bahar Azadi est née à Téhéran, elle est aujourd’hui sociologue à Paris, la jeune femme de 35 ans attend un enfant et se projette dans l’avenir : « Je pense que cette lutte, pour moi, ce n’est pas que pour moi-même, pour le peuple iranien, mais c’est aussi pour mon fils. Je souhaite qu’il puisse naître dans un monde où il n’y a pas la République islamique, où il n’y a pas l’islam politique. Et un jour, peut-être, il pourra visiter l’Iran, ses grands-parents, sans la République islamique. C’est vraiment mon souhait. Et il sera un garçon, bien sûr, féministe. »
Pour cette sociologue iranienne, « la raison de cette contestation est basée sur cette question centrale qui est le corps de la femme ». Sur la suite du mouvement, Bahar Azadi estime qu’il va devoir s’amplifier et prendre d’autres formes : « On ne peut pas attendre que les gens viennent tous les jours dans la rue. Beaucoup de gens ont déjà donné leur vie, donné leur jeunesse pour cette révolte. Je pense qu’il faut passer à autre chose. Il faut espérer avoir des grèves en Iran. C’est la première fois que je ne peux pas imaginer qu’on puisse revenir en arrière. Hier, par exemple, la mère d’Aliouche Alizadeh, un jeune Iranien qui a été assassiné, a dit : « Ne me présentez pas des messages de condoléances. Continuez la lutte ». C’est une mère qui a perdu son fils. On voit beaucoup de parents qui ont dépassé ce niveau de tristesse, mais sont arrivés à un niveau de colère et appelle le peuple à continuer la lutte. »